Zéli la carthaginoise, Zilis la romaine, Arzila la portugaise mais surtout, Asilahla marocaine. Située à une quarantaine de kilomètre de Tanger, cette ville est parmi les destinations les plus authentiques du nord du Maroc. La douceur de son climat ainsi que son héritage architectural occidental et arabo-andalous attirent les artistes du monde entier.
Paisible ou sereine pour les uns, magique ou majestueuse pour les autres, Asilah a toujours exercé une séduction singulière sur les artistes. Ses ruelles, ses maisons blanchies à la chaux, ses portes bleues et ses petites échoppes de corail ont largement contribué à son succès. Source
Asilah est une ville côtière fondée par les phéniciens. Ses murailles défensives ont été construites par les portugais durant la période médiévale. De nos jours, la ville est un port, une cité balnéaire, un marché et un centre événementiel culturel. Mais cela n’a pas été le cas quelques années en arrière…
En 1978, deux artistes marocains, Mohammed Benaissa et Mohammed Melehi, ont contribué à changer l’image de la ville en la transformant d’un tas de ruine caché derrière d’anciennes murailles en galerie à ciel ouvert. Ainsi, durant le Moussem culturel d’Asilah, la ville s’orne d’œuvres d’artistes de renom: Richard Dana, Sylvia Gussman etc. Les revenus tirés de ce festival ont contribué à financer le plan de réhabilitation d’Asilah, ce qui lui a valu en 1989 le prix Aga Khan Award for Architecture.
Palais Raïssouni, Joyau d’Asilah
Créée en 1910, le K’sar Raïssouli ou palais de la culture est un joyau de la médina. Avec son style architectural d’héritage andalous, le palais s’est vu transformé en 1998 grâce à des travaux de rénovation de grande ampleur. Il abrite de nos jours des ateliers de peinture et gravure collectifs, organisés pendant la période du Moussem culturel.
“Je veux rester assis, là, toute ma vie” – Pierre C. raconte…
« Il existe des moments qui te marquent à vie. Il existe des lieux où l’Art semble plus libre qu’ailleurs et où l’échange est plus évident, en tout simplicité.
J’ai aujourd’hui 30 ans, et il ne se passe pas plus d’une semaine sans que je repense à mon séjour à Asilah alors que j’en avais 19.
Accompagné de 4 camarades de l’Université de Grenade en Espagne et de ma guitare, nous avions passé 3 jours dans ce village marocain au bord de l’Atlantique avec l’intention de profiter de la quiétude qu’offre cet endroit.
Il est une heure pas très avancée de l’après-midi, mes amis, ma guitare et moi marchons dans un champs, les environs sont déserts. La lumière, les odeurs…je m’en souviens encore.
C’est alors que nous voyons un paysan et son petit frère s’approcher de nous. Peut-être qu’ailleurs on nous demanderait de partir, on nous questionnerait… Notre réflexe d’enfants de grandes villes européennes est alors de lui faire signe pour qu’il comprenne que nous nous apprêtons à partir.
Mais il nous demande de nous asseoir à ses côtés, en plein milieu du champs, face à l’océan. Les présentations commencent. Nous ne parlons pas Arabe, Il ne parle ni Français, ni anglais…mais pour autant je m’apprête à vivre l’un des moments les plus riches en émotion de ma jeune vie.
Il avait dû remarqué la forme de ma guitare au loin…il me regarde et me dit: “Bob Marley!” Je m’exécute, je démarre les accords de “Buffalo Soldier”, un titre qui prend encore plus de poids quand tu le joues le cul collé à la terre Africaine. Et notre hôte se met à baragouiner dans un anglais “yaourt” l’air du refrain…les seules paroles correctes étant la fin de la phrase “…to America”.
Son niveau d’anglais désastreux nous fait tous éclater de rire (lui y compris!) et tout le monde se met à chanter et taper des mains.
J’ai 19 ans, je suis avec 6 personnes que je connais à peine, à Asilah, en train de jouer un morceau de Bob Marley face à l’Atlantique en pleine nature, le temps s’arrête.
Je veux rester assis, là, (pour les adeptes des jeux de mots) toute la vie.
Puis le moment passe, on se sépare, le paysan nous embrasse tous un par un, j’en profite pour apprendre trois mots en Arabe et nous reprenons le cours de nos destins respectifs.
Sur le chemin du retour, il a bien dû se passer 10 minutes sans qu’aucun de mes amis et moi ne dise un seul mot. Mais on n’arrête pas de se regarder et on se comprend sans se parler. Les lèvres plissées, un acquiescement, l’œil qui brille, nous sommes connectés. Et à cet instant très précis, on est tout simplement heureux et on le sait. On vient d’échanger avec l’humain, de partager avec notre prochain.
La musique est universelle, elle ne peut que rassembler les peuples et témoigner d’une civilisation…
Au cours de ce séjour, j’ai aussi rencontré des musiciens locaux qui m’ont spontanément demandé de jouer avec eux, j’ai croisé un chef de cuisine qui peignait des tableaux de paysages absolument lumineux, j’ai croisé des danseurs, des sculpteurs…
Il n’y a aucun doute, Asilah est une artiste…ou une œuvre d’art à vous d’aller voir… Que Dieu bénisse Asilah et ses habitants. »